« Sexual Healing »

Aaron & Vesper

 Brûlante, l'eau du réservoir invisible caresse ma peau, aussi longtemps que je me permets ce luxe jusqu'alors inconnu. La « douche », merveilleuse invention des hommes de ce monde. Ils m'étonnent, ces petits terriens. Ils sont dits sans pouvoirs mais ils sont à l'origine d'inventions tout à fait magiques. Leurs possibilités sont différentes des nôtres, voilà tout. Chez eux la magie fonctionne différemment. Mais ils sont capables de grandes choses, grandioses.

Comme de m'abreuver d'un bien-être sans limites à passer tous mes matins dans cette cabine, le pommeau de douche déployant son geyser d'eau chaude sur mon corps détendu. L'abus est tel que j'y resterai bien des heures entières, parfois. Rien à voir avec les bains glacés d'Elendir ! Cela me rappelle les sources chaudes du troisième Royaume, que j'ai visitées en compagnie de Peter, il y a longtemps déjà. Cette fois, ce n'est plus ce bouffon volant qui m'attend sagement.

Je tourne un large bouton et coupe le jet. Tête relevée, j'essore mes cheveux blonds, tant assaillie par la chaleur fumante de l'espace étroit que j'en ai du mal à respirer. Ouvrant la porte, je m'empare d'une chaude serviette que j'enroule autour de moi et resserre au niveau de la poitrine, profitant de l'air frais s'engouffrant à l'intérieur de la cabine. D'une légèreté déconcertante, je pose un pied à l'extérieur et sautille jusqu'au lavabo, la différence de température provoquant en moi quelques frissons. L'oeil rivé sur l'immense miroir, j'observe le reflet qui me fait face. Même trempée jusqu'aux os, je ne saurais perdre cette grâce exquise qu'est la mienne. Mes cheveux séchés, je les attache à l'aide d'une pince papillon et étalé une crème hydratante sur mon visage. Les Hommes sont des as, question cosmétiques...

« Vesper ? » Son impatience m'envahit d'une délicieuse excitation. Mutine, je ne réponds rien, trop heureuse à l'idée de me faire désirer. Quand enfin, je juge ma beauté naturelle suffisamment arrangée, je m'apprête à affronter le Capitaine sous ma fine serviette éponge. M'arrêtant sur la poignée de la porte refermée derrière moi, je croise son regard brûlant d'impatience et de curiosité. Sans doute s'attendait-il à me retrouvée pomponnée comme s'il était question de nous rendre au bal du coin... Le pauvre, dire que je ne suis même pas habillée...

Allongé sur le lit, bras sous la tête, il se relève à peine quand je déambule jusqu'à son chevet. Je m'arrête à son niveau et, soupirant, caresse sa boussole d'or, délicatement posée sur la table de nuit. Lorsque je vais pour m'en saisir, le marin me gratifie d'une tape sur la main. « Hin hin. » Leçon n°1 : ne pas toucher aux biens des pirates. Jamais ! Soupirant, je lève alors les yeux au plafond et déforme ma bouche en une moue faussement boudeuse. « Je m'ennuie. » Je réfléchis, avant d'ajouter : « Je m'habille et je sors ! » Mais, je n'ai pas le temps de faire volte-face que déjà, mon compagnon de débauche m'a saisie aux poignées, et usant de sa force masculine sur mon corps de moineau, me soulève aisément jusqu'à m'allonger près de lui. « A moins que vous ayez d'autres projets en tête, mon Capitaine... » Des projets dont je serai le but, l'objet central de sa convoitise, et non ses envies de grandeurs, de pouvoir et de richesses...

Je ferme doucement les yeux tandis que ses lèvres s'apposent à mon front, frôlent mes paupières, me caressent le bout du nez. Une pluie de baisers s'abat sur mon visage alors que la radio, faiblement allumée, scande la suite des évènements sans la moindre pudeur...

Vicieuse et tentatrice, je finis par affamer la bête. Frémissant sous les caresses du pirate, je supporte la totalité de son poids. Le bougre n'en a que faire de m'écraser sous son désir ardent ! Gentiment, je le repousse, un sourire narquois étirant mes lèvres fines. « Aïe », murmuré-je à son oreille, extrêmement peu crédible... Je le cherche, le tente, le frustre... du moins essaie. Il est habitué, à mes caprices comme à mes ruses. Il sait, aussi, que je finis toujours par me prendre à mes propres pièges... Cambrée sous l'audace de ses baisers brûlants, je me tortille enfin sous son corps d'Apollon, appréciant son toucher délicat. Vil pirate, sale brigand ! Combien savent aussi bien y faire avec les femmes ?! Mon Peter, peut-être... ce traître infâme, cette pourriture ! Ce sale coureur m'ayant fait tant de mal...

Bien vite, je tache de l'ôter de mes pensées, mais il a suffit à les assombrir en l'espace d'une seconde. Embrassant pourtant mon pirate, je l'arrête d'un geste de la main et plonge totalement ma tête au creux de l'oreiller moelleux. Ainsi, je mets prématurément fin à nos ébats, qui je le sais d'avance, reprendront un peu plus tard. Mon partenaire note ma moue boudeuse, et mon manque soudain de motivation. Ca l'agace, je pense, même s'il tache de n'en rien montrer. Quel homme apprécie d'être coupé dans son élan par le mauvais caractère de sa compagne ? D'autres partent pour moins que ça... Ah ah ! Seulement moi, je suis Vesper Ruthven, fée du 6ème Royaume, et jusqu'alors, le seul homme que je n'ai pas réussi à retenir se nomme Peter Rhovan. Même ce coureur de Crochet se plie plus ou moins à mes exigences, en vérité. Ce qui relève de l'exploit et dont je suis très fière... manquant souvent de me demander ce que cela peut bien cacher.

Contemplant ses yeux d'un bleu profond, comme celui de sa mère patrie, l'océan, je laisse toutes ces questions m'envahir peu à peu. D'un bout à l'autre, se peut-il qu'il se soit servi de moi pour mettre en pratique ses sombres desseins et qu'il me réserve un sort on ne peut plus tragique ? J'aimerais bien savoir, moi, ce qu'il se passe au fond de sa petite tête de pirate. Bien entendu, je n'ignore pas lui avoir été d'une utilité fort inattendue. Ce que j'aimerais savoir, c'est... s'est-il attaché à moi ? Au point d'être jaloux, et de me sauver la vie si besoin ? Me garde-t-il encore près de lui pour mener à bien d'autres projets dont il ne m'aurait pas pas encore parlé ? Le problème, c'est que sans moi il ne serait arrivé à rien. Autrement dit, une part de lui est forcément intéressée. Oh oui, il l'était, bien avant que je le rejoigne. Ce que j'aimerais vraiment savoir, c'est : sa considération a-t-elle évolué à mon égard ?!

Lui ne me rend pas triste, il ne le pourra jamais. Mais par fierté, j'aimerais savoir si je hante ses nuits et ses pensées. Si son besoin de moi s'étend au-delà de ses envies de grandeurs et de domination.

Doucement, je caresse son visage et l'emprisonne entre mes mains, l'attirant à moi pour mieux l'embrasser. Du bout des lèvres, je parcours l'arête de sa mâchoire, la commissure de ses lèvres, son nez... « Que veux-tu faire aujourd'hui ? » lui demandé-je, particulièrement intéressée. Comme il ne répond rien, j'insiste, on ne sait jamais : « Quels sont tes projets ? » Pour la journée, pour l'avenir...
A son sourire pervers et sa douce caresse sur l'intérieur de mes cuisses, je devine assez bien ses envies immédiates. Secouée d'un rire à la fois chatouilleux et nerveux, je penche la tête en arrière comme je peux. Lui en profite pour sceller ses lèvres aux miennes en un fougueux baiser. Soit. Pour cette fois, je me laisse tenter, allant jusqu'à l'entourer de mes bras. Du bout des doigts, je caresse ses épaules et son torse musclé, tout aussi balafré. Ah, la vie d'un pirate n'est décidément pas sans danger !

Un petit aïe à peine prononcé à mon oreille me fait frémir de volupté, et je reprends de plus belles mes baisers ardents sur la peau de ma belle. Taquin je mordilles ces lèvres tentatrices et mesquines qui me punissent comme elles me comblent. C'est ainsi que toute femme est la plus belle. Alanguie de ses cheveux dorés éparpillés autour de son visage fin et mutin. Ses grands yeux vairons papillonnant sous l'effet de son désir. Ses joues douces que j'effleure de ma bouche, se colorent à peine d'une teinte rosée sous le sentiment qui nous enchaîne. Son cou est si mince sous mes doigts qui le parcourent. Ses épaules si petites, à peine arrondies...Cette fragilité feinte d'apparence est si fascinante que les hommes s'y perdent encore...mais je dois reconnaître que le corps de ma fée est particulièrement fascinant. Et elle sait en jouer la mutine. Provoquant mon désir pour obtenir ce qu'elle veut, ou me rendre la monnaie de ma pièce. Me réveillant de caresses lascives du bout de ses doigts taquins quand le sommeil la quittant doit me fuir aussi. Elle aime me faire voir qu'elle a une emprise sur moi. Que je ne peux l'ignorer. Si jalouse...elle m'en a tant voulue quand j'ai embarqué Rose avec nous. Une autre femme à bord, qui plus est une femme superbe...Vesper ne remet certainement pas ses charmes en doute. Mais que mon regard ou mon désir puisse se porter sur une autre lui est intolérable. Ses baisers sont voraces, intenses et brefs...lunatique est le deuxième prénom de la piquante créature qui partage les draps. La voilà qui se détourne de mon corps, me repoussant doucement et enfouissant son visage dans l'oreiller.
Me surélevant sur un coude, je passe une main douce le long de son dos jusqu'à la naissance de ses fesses. Geste apaisant qui avec un peu de chance m'apportera des réponses. Je suis peut être d'un naturel violent et autoritaire, mais c'est que la vie d'un pirate n'est pas dans les courbettes et les sourires complaisants. Ce qui ne m'empêche pas de savoir enjôler les femmes et apaiser leur fureur. Mais rien n'est plus différent qu'une amante d'une nuit et d'une femme qui partage ta vie. Ce n'est pas l'amour qui nous lie la fée et moi. Nous sommes trop cupides pour cela. L'allégeance nous a d'abord fait s'affronter, puis l'intérêt et la vengeance se rapprocher. Il y a plus bien sur...Elle est belle et malgré ses caprices incessants qui me font souvent jurer et punir plus que de nécessaire ou d'envie mon équipage, j'apprécie sa compagnie. Me réveiller avec son corps tiède contre moi. La regarder s'habiller, s'énerver parce qu'elle ne trouve rien alors que ses coffres à vêtements prennent la moitié de la place. Patiemment je coiffes ses cheveux, appréciant cet instant sans questions ou reproches. Toutes les femmes aiment cette attention même si la mienne préférait d'autres mains. Mais son bouffon vert l'a abandonné sans considération lui. Je ne peux peut être pas lui offrir un amour sincère, mais mon intérêt n'est pas feint. Pour une fois que je n'ai rien d'urgent à faire, pas de matelots à secouer, de bateau à diriger, de pillage à ordonner ou de femme à combler je profites de cette immobilité apaisante. Oh je m'en lasserais vite. Surtout en ayant une telle tentatrice tout contre moi.

Son regard se fixe au mien, impérieux et inquisiteur. Je ne sais quelles réponses elle cherche dans mon regard. Je n'ai rien à offrir, ni passé ni avenir. Je peux lui donner tous les bijoux et les parures qu'elle souhaite, faire de tout son corps le plaisir même mais cela s'arrête là. Pirate dans l'âme et le corps beauté...Et la lumière d'une fée ne saurait étreindre trop longtemps la froideur fracassante de la mer. Un sourire langoureux étire mes lèvres alors que d'une main j'étreins doucement son corps. Ses lèvres reviennent inquisitrices aux miennes, les emprisonnant dans sa fougue avant que ses mains ne se posent sur mon visage douces mais fermes. Je la laisse faire, rapprochant nos deux corps lentement. Ses questions n'ont pas de réponses. Du moins pas celles qu'elles voudraient. Elle partira. Je ne peux compter sur elle, pas plus que tout autre personne. Je l'ai pourtant convaincu d'ouvrir le passage et de me suivre à New York. Je préfères l'embrasser avec force. Parler est toujours dangereux. Sa question reformulée, je me détaches de ses lèvres et souris sans équivoque en glissant ma main entre ses cuisses. Invitation tout à fait clair très chère non ?

Nul besoin de paroles et de promesses quand la passion gouverne le jeu. Je l'embrasses encore, m'enivrant de son parfum et de sa douceur. Satisfait de sentir ses mains entourer mes épaules et mon torse. Je glisses les miennes le long de ses flancs, effleurant ses seins, suivant la ligne creuse de sa taille, puis ses hanches, et ses jambes qui continuent bien trop loin. Retour à sa nuque, caché par sa chevelure, que je titilles en connaisseur.